Bienvenue dans notre dernier bulletin d’actualité en infectiologie de novembre 2023.
Dans ce numéro, nous aborderons les points suivants :
- La rareté de la rage en France et l’importance de la vaccination pour les voyageurs.
- Les principaux effets indésirables du vaccin Covid à ARN.
- L’association potentielle entre les vaccins contre le zona et la grippe et la réduction du risque de démence.
- Le surtraitement antibiotique et les stratégies de bon usage, notamment l’utilisation de durées courtes de traitement.
- La prophylaxie antibiotique pour les contacts à risque en cas d’infection invasive à strepto A.
- Les antibiotiques associés au risque d’infection à Clostridium difficile.
Rage
Le décès d’une femme hospitalisée au CHU de Reims le 9 octobre dernier a ranimé le sujet. Rentrant d’un voyage dans le Maghreb, elle et son mari avaient été blessés par un chat. La femme avait été admise aux urgences le 7 octobre présentant des symptômes compatibles avec ceux de la rage mais elle n’a pu être sauvée. Le diagnostic de rage a été confirmé par le Centre national de référence de la rage (CNRR) deux jours plus tard. Rappelons que la maladie est due à un virus neurotrope, le Lyssavirus, et qu’elle tue 60.000 personnes par an dans le monde. Les chiens sont à l’origine de l’exposition au virus dans 95% des cas. D’autres canidés (renards, loups) et les chauves-souris contribuent aussi à la transmission.
Vingt-cinq cas de rage ont été enregistrés en France depuis 1975, 23 cas d’importation et 2 cas autochtones. Une vaccination préventive est recommandée aux voyageurs pour les séjours prolongés ou en situation d’isolement dans les zones à haut risque : Asie, Afrique, y compris l’Afrique du Nord, et Amérique du Sud. Cette vaccination est particulièrement recommandée pour les jeunes enfants qui sont plus exposés au risque d’infection par morsure, griffure ou encore léchage sur peau excoriée. Elle comprend 3 injections de vaccin à J0, J7 et J21 ou J28 (ou schéma accéléré J0, J3, J7).
En cas de contact avec un animal possiblement enragé, le développement de la maladie peut être prévenu par une prophylaxie post-exposition (PPE) mise en place précocement. Elle comprend le nettoyage minutieux des plaies à l’eau et au savon, l’application d’un antiseptique et la vaccination. Selon les caractéristiques de la plaie, des antibiotiques, des analgésiques et/ou une vaccination antitétanique, peuvent être indiqués
En France, la PPE est réalisée dans un centre antirabique. Chez les patients non immunisés ou ayant un statut immunitaire incertain, la première injection de vaccination antirabique doit être réalisée au plus tôt après l’exposition et impérativement avant l’apparition des premiers symptômes qui surviennent entre 20 et 60 jours plus tard. S’appuyant sur les recommandations de l’OMS, la HAS préconise la vaccination par le vaccin Rabipur® ou le vaccin rabique Pasteur®, par voie intramusculaire (IM) ou intradermique (ID). Par voie ID, 4 injections (protocole Zagreb) sont réalisées en 2 sites aux jours J0 (2 injections), J7 et J21 ou 5 injections (protocole Essen).
L’administration d’immunoglobulines est recommandée en cas d’exposition de niveau III (morsure ou griffure ayant traversé la peau ou contact de salive sur plaie ou muqueuses) ou dès le niveau II chez les immunodéprimés (peau découverte mordillée, griffure bénigne ou excoriation sans saignement, léchage sur peau érodée). Dans ce cas, elle est réalisée à J0, en même temps que la première injection vaccinale. Chez les sujets ayant déjà reçu une prophylaxie pré-exposition, une PPE ou ayant arrêté la PPE après avoir reçu au moins deux doses, seules deux doses de vaccins sont administrées à J0 et à J3 en IM ou bien en une seule fois, mais sur 4 sites à J0 en ID4 4,5.
Sources :
Covid : Effets indésirable des vaccins à ARN
Concernant le vaccin à ARN messager Comirnaty® (mono ou bivalent), commercialisé par BioNTech et Pfizer, 126.802 cas d’EI ont été déclarés depuis le début de la vaccination sur plus de 123.673.800 injections réalisées. La majorité d’entre eux étaient attendus et non graves (26% de cas graves).
Les signaux confirmés*, c’est-à-dire pour lesquels le lien entre l’effet indésirable et le vaccin est avéré, concernent les hypertensions artérielles (152 cas initiaux cumulés depuis le début de la vaccination), les myocardites/péricardites (867 cas cumulés, 0,7%) et plus souvent des saignements menstruels importants (13.250 cas cumulés).
Des signaux potentiels** déjà identifiés lors de précédents rapports sont renforcés par les données récentes, notamment pour les troubles de l’audition (cas de surdité, 1,45/1 million), l’hémophilie A acquise (26 cas cumulés) et le syndrome de Parsonage-Turner (ou névralgie amyotrophiante de l’épaule, 51 cas confirmés).
Par ailleurs, « de nouveaux signaux potentiels sont à considérer pour les aménorrhées, les dysménorrhées, les douleurs pelviennes inter-menstruelles, la recrudescence de la symptomatologie liée à l’endométriose chez des patientes ayant un antécédent d’endométriose, et les métrorragies post-ménopausiques »
Depuis le début de la vaccination, plus de 24 millions d’injections ont été réalisées en France avec le vaccin bivalent Spikevax® de Moderna, et 33.794 cas d’EI ont été rapportés, là aussi attendus et non graves pour la plupart. Les signaux confirmés restent des cas graves d’hypertension artérielle (30 cas initiaux cumulés), y compris chez des sujets jeunes et sans antécédents, de myocardites/péricardites (128/254), des érythèmes polymorphes et plus fréquemment de réactogénicité (8,9%) et de saignements menstruels importants (23,4%).
Ces EI sont le plus souvent transitoires et non graves, mais peuvent nécessiter une prise en charge spécifique. Par ailleurs, de rares cas de surdité brutale (70 cas graves cumulés), d’hypertension artérielle (144), de syndrome de Parsonage-Turner (27) ont été rapportés et constituent un signal potentiel.
Sources :
Vaccin zona et prévention démence
Une méta-analyse sur 17 études soit 1 857 134 participants, publiée en 2022 rapportait une diminution du risque de démence avec des vaccins standard dont les vaccins grippe et zona, HR =0,65. Néanmoins des questions concernant les risques de biais potentiels n’étaient pas entièrement levées avec une grande hétérogénéité entre les études. D’autre part la question d’un effet spécifique de la vaccination zona versus un effet non spécifique lié à la stimulation immunitaire restait posée. Le but de cette étude est de répondre à cette question avec une méthodologie minimisant les risques de biais notamment la prise d’antiviraux.
La vaccination zona était associée à une réduction du risque de démence HR ajusté : 0,78 [IC 95% :0,77-0,79], d’une démence d’Alzheimer HR 0,91 [0,89-0,92] ou tout type de démence HR = 0,71 [0,68-0,72]. Le vaccin grippe était associé à une discrète réduction du risque de survenue d’une démence avec HR =0,96 [0,94-0,97], sans relation pour la démence d’Alzheimer HR = 1,10.
Source : Info ATBVAC
Antibiothérapies ambigues
Selon une enquête française publiée en octobre 2023, les recommandations sur l’usage des antibiotiques (choix de la molécule et durée de la prescription) dans les principales infections communautaires françaises sont plutôt connues des médecins généralistes pour les pathologies où les recommandations sont claires.
Mais l’adhésion aux préconisations est moins élevée dans les autres cas, comme celui des exacerbations de la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), où deux textes de référence coexistent, et dans les pneumonies aiguës communautaires des patients âgés, où l’évolution des recommandations a pu conduire à des confusions.
Il en est de même dans la pyélonéphrite où la durée déclarée de prescription des fluoroquinolones est supérieure aux recommandations, alors que ces antibiotiques à large spectre jouent un rôle essentiel dans l’émergence de résistances bactériennes.
Le surtraitement est associé à l’âge du praticien (>40 ans) et à l’exercice en milieu rural et en hospitalier.
Source : Univadis
Antibiothérapies courtes
On rappelle qu’un des grands principes du bon usage des antibiotiques et de limiter la durée des prescriptions.
La SPILF et et le GPIP ont donc émis des recommandations sur les durées d’antibiothérapies pour infections courantes, non compliquées, en évolution favorable, ici l’extrait de l’article “Infectious Diseases Now” et du diaporama de synthèse du groupe recos, et ici la fiche récapitulative à imprimer et afficher à coté de votre écran !
Source : infectiologie.com
Conduite à tenir autour d’un cas d’infection invasive à Streptococcus pyogenes (IISGA) :
Information des sujets contact sur leur risque de développer une infection et l’urgence en cas de signes d’infection.
Antibioprophylaxie limitée aux personnes les plus à risque de forme grave :
- Si contacts rapprochés prolongés ou répétés avec le cas index
- De 7 j avant le début des signes à 24h après le début de l’antibiothérapie du sujet index
- Le plus tôt possible, idéalement dans les 24h, et jusqu’à 10j après le diagnostic
- ET uniquement pour les personnes et situations suivantes
-
- Femmes enceintes de plus de 37 semaines d’aménorrhée,
- Nouveau-nés (jusqu’à 28 jours de vie),
- Femmes ayant accouché dans les 28 jours précédents,
- Personnes âgées de plus de 65 ans,
- Personnes ayant une varicelle,
- Personnes vivant dans des conditions particulières de précarité (personnes sans domicile fixe par exemple),
- Tous les sujets contacts vivant sous le même toit qu’un cas, lorsqu’un d’entre eux nécessite une antibioprophylaxie.
Sources :
Risque de C. difficile selon les ATB
Clindamycine et céphalosporines orales de seconde & troisième génération présentent le risque le plus élevé, fluoroquinolones et pénicillines un risque modéré, macrolides et sulfamides un risque plus faible, et les tétracyclines un risque presque nul.
Ce travail montre des variations considérables entre les d’antibiotiques au sein d’une même classe.
Sources :